Créées pour affirmer, soutenir et justifier l’action militaire française au début de la guerre d’Algérie, les Sections Administratives Spécialisées (en abrégé, SAS) furent mises en place au cours des années 1955-1956 afin de lutter de façon la plus efficace possible contre l’insurrection menée par le Front de
Libération Nationale (FLN) à l’échelon local. Cet instrument militaire, pourtant largement tourné vers
des tâches civiles, avait pour but de porter un coup d’arrêt au FLN au coeur des mechtas ou des oueds,
partout où la population pouvait être fidélisée ou reconquise par de multiples modes d’action.
Instrument politique, les SAS s’inscrivaient à l’échelon local comme les représentants directs des
autorités civiles par les moyens administratifs dont ils bénéficiaient. Héritiers reconnus des officiers des
Bureaux arabes, reprenant à leur compte les leçons des pacificateurs des temps héroïques de la
colonisation à l’instar d’un Lyautey ou d’un Gallieni, les officiers des SAS représentent l’un des succès
d’un conflit dont on se plait souvent à rappeler les erreurs, les tourments, les déchirures, en oubliant les « képis bleus ».
Les missions dans des tâches tant militaires que civiles appelle des comparaisons. Qu’on se souvienne de ces jeunes officiers qui le jour, prenaient en main la construction d’un réseau d’eau potable, l’aménagement d’un douar, ou tenaient l’école, tandis que la nuit, ils patrouillaient, livrant combat à des bandes armées, neutralisant la menace d’attentats.
On constate certaines similitudes entre le passé et le
présent, entre les responsabilités des officiers qui prirent une part essentielle au conflit algérien et les
missions aujourd’hui dévolues aux forces françaises de ce début de XXIe siècle. L’intervention des
SAS, insérées dans le dispositif opérationnel au moment où la lutte contre le FLN prend une nouvelle
tournure1 n’est pas sans rappeler les phases de stabilisation dans les conflits actuels.
Les SAS souffrent aujourd’hui d’un déficit de reconnaissance. Quelques rares ouvrages leurs ont été
consacrés. L’action des SAS a ainsi été occultée par l’étude de problématiques plus sensibles.
Par ailleurs, ces unités spécialisées portent en elles deux blessures qui nourrissent encore
aujourd’hui un débat animé au sein de l’opinion publique. D’abord, le problème des harkis. Les SAS
furent parmi les unités qui recrutèrent et employèrent le plus d’unités supplétives, les fameux harkas et maghzen. Ces troupes s’étaient engagées aux côtés de l’armée française, en faveur de la France, et
furent démobilisées à partir du cessez-le-feu de mars 1962. Leur choix politique fut pour certains
synonyme d’arrêt de mort, tandis que quelques-uns, aidés par leurs officiers, quittaient l’Algérie avec leur famille pour des camps dressés à la hâte dans le Sud et l’Ouest de la France.
Ensuite, la question des « soldats perdus ». La plupart des officiers SAS avaient leur idée de
l’Algérie française, c’est-à-dire une égalité entre Français de métropole et Français d’Algérie, sans condition de race ou de religion. À la fin de la guerre, certains membres des SAS ont naturellement continué le combat qu’ils croyaient juste dans les rangs de l’Organisation de l’Armée Secrète (OAS).
Créées en 1955, les SAS se multiplient surtout entre 1957 et 1959, devenant un maillon essentiel du commandement pour lutter au niveau local contre les rebelles et pour montrer à la population le visage d'une France qui se soucie d'elle.
Le lointain héritier des bureaux arabes du maréchal Bugeaud, des affaires indigènes du maréchal Lyautey et des SAS de la guerre d'Algérie. »
Assurer sa sécurité tout en favorisant les échanges entre population civile et armée, afin de permettre dans un second temps, le redémarrage d’activités économiques, politiques et administratives normalesque l'on nommait « pacification »,c'est à dire employer, selon la situation et les moyens à disposition, pour répondre à ses besoins.
Les SAS paraît répondre à la plupart de ces exigences : officiers présents sur le terrain,
vivant au sein des villages des zones soumises à leur responsabilité, ces soldats luttèrent à la fois contre l’influence du FLN par la quête du renseignement, la conquête de la population, et par la mise en place d’exercices de confiance entre les officiers et les élites locales.
Ainsi, les chefs de SAS menaient des actions dans un cadre qui était celui d’une France dotée des mêmes droits et des mêmes devoirs de Dunkerque à Tamanrasset. Cela signifiait aussi, par corrélation, que l’Algérie, c’était la France et que si les troupes avaient peut-être vocation à être redéployées, elles ne quitteraient pas pour autant le pays.
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